mercredi 2 avril 2008

Les satanistes, de bons petits diables ?

Quotidien en ligne Bakchich, mercredi 2 avril par Ian Hamel


Juste avant la sortie du rapport annuel de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) rappelant, au détour d’un chapitre, les dangers de la mouvance sataniste, quatre chercheurs plaident la thèse inverse dans un livre très documenté (*). Pour eux, les adeptes de Lucifer ne feraient pas de mal à un ange. Pendant le Moyen-Age, les tribunaux de l’Inquisition en France ont envoyé aux bûchers 30 000 personnes, pour l’essentiel des femmes issues du monde rural, accusées d’avoir passé des pactes avec le diable. Entre 1486 et 1669, le livre Le Marteau des sorcières, rédigé par deux inquisiteurs allemands, a été réédité 34 fois ! On sait maintenant que cette chasse aux sorcières ne recoupait aucune réalité historique. « L’Église a créé, pour une large part, un système complexe de sorcellerie contre lequel elle a mené, ensuite, une lutte implacable », affirment les auteurs du livre Le satanisme [1] Dans son rapport annuel, qui sera remis au Premier ministre le 3 avril, la Miviludes affirme que 25 000 personnes en France, en grande majorité des adolescents, sont en contact avec le satanisme. « C’est ridicule. Je travaille sur le satanisme depuis douze ans. Savez-vous combien notre pays compte-t-il de vrais satanistes ? 110, certainement pas 25 000. Les autres, notamment les amateurs de musique black metal ou gothic, ne font que du braconnage satanique. Ce n’est que du bricolage intellectuel. Ils ne sont absolument pas dangereux », avance Olivier Bobineau, maître de conférence à Sciences-Po, et enseignant à l’Institut catholique de Paris, l’un des auteurs du livre. Mais qui profane les cimetières ? En clair, si votre fils fait le « signe de la bête » (le poing fermé avec l’index et l’auriculaire redressés), cela ne signifie pas forcément qu’il se relève la nuit pour déterrer les morts dans le cimetière voisin. « Pour certains adolescents, c’est une façon de s’opposer, non seulement à ses parents, mais aussi aux professeurs, aux prêtres, aux patrons », ajoute Olivier Bobineau. Pour la petite histoire, le chercheur a été conseiller scientifique à la Miviludes pendant quelques semaines en 2005. Les relations se sont très vite détériorées. Et il ne déplaît pas au dissident de remettre en cause, à la faveur de ce livre, arguments à l’appui, les thèses de la Mission.
Mais qui profane les cimetières ?


Toujours selon Olivier Bobineau, ces crimes seraient davantage le fait de néo-nazis, de cas sociaux ou pathologiques et non de satanistes. On lui objectera que la frontière entre les deux mouvances est loin d’être aussi étanche qu’il le postule. Ainsi, Il y a quelques années, le leader d’un groupuscule d’extrême-droite plutôt musclé se trouvait être aussi l’animateur d’un cercle féru de magie noire et de satanisme…



[1] « Le satanisme. Quel danger pour la société ? ». Sous la direction d’Olivier Bobineau. Éditions Pygmalion. 312 pages.

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